Comment les sociétés ‘se débarrassent de leurs vivants’: Dangerosité et Psychiatrie, la donne contemporaine VoruzVéronique 2018 La psychiatrie est toujours plus convoquée au dépistage et à la gestion des individus dits dangereux : nombreux sont les pays qui utilisent des instruments actuariels pour produire une mesure « objective » du risque présenté par un individu souffrant de « troubles mentaux », ainsi que ceux qui introduisent des sanctions judiciaires pour les psychiatres qui échoueraient dans leur mission de contrôle social. Or la notion de dangerosité n’est ni juridique ni médicale : elle résulte de la technologie de pouvoir qu’est l’expertise médico-légale. À ce titre, elle fut problématisée par Michel Foucault dans une série de textes et interventions des années 1970 en tant qu’elle a permis la mise en place d’un « doublage juridico-clinique » entre acte criminel et subjectivité criminelle. Face au tout-sécuritaire utilitariste, cet article fait retour sur les problématisations foucaldiennes afin de tenter de miser sur « les capacités éthiques » des acteurs du monde médico-légal et de déstabiliser une mise en intelligibilité banalisée du droit pénal en termes de gestion des risques. Psychiatrists are forever more expected to detect and manage individuals said to be dangerous. Many are the countries that rely on actuarial instruments to produce an “objective” measure of the risk represented by “mentally disordered” individuals, and that have introduced legal sanctions for psychiatrists failing in their social control mission. Yet, the notion of dangerosity is neither a legal nor a medical one: it was produced through the technology of the psychiatric assessment. Michel Foucault problematized the psychiatric assessment in the 1970s, in a series of texts and conferences which showed it to be the technology of power that enabled the constitution of a “juridico-clinical redoubling” between the criminal act and criminal subjectivity. Given the security imperative that prevails in our utilitarian times, this article returns to Foucault’s problematizations in order to call upon the “ethical capacities” of the actors of the medico-legal world, and to destabilise a now commonplace rendering of criminal law in terms of risk-management.